Tu souffles en triturant le bas de ton haut de pyjamas. Tu tires une moue innocente tout en regardant autour de toi. Ton père est dans la même salle que ta mère et toi, t'es tout seul dans le couloir de l'hôpital. Les gens passent devant toi en te regardant avec des sourires attendris. Ils te trouvent sûrement trop mignons, avec tes joues gonflés, tes cheveux ébouriffés et ton air endormi. Tu ne sais pas. Tu es bien trop jeune pour penser à cela. Du haut de tes quatre ans, tu restes bien droit, assis sur la chaise et tu balances tes petites jambes d'avant en arrière. Ton père t'a demandé de ne pas bouger, alors tu obéis. Tu restes sagement là, au milieu de ce couloir d'hôpital. Tu l'entends crier, ta maman, mais tu ne peux rien faire. On t'a dit que c'était normal ; qu'elle devait crier très fort pour que ta petite sœur arrive alors tu ne dis rien, te contentant d'attendre comme on te l'a gentiment demandé. Tu te mords la lèvre inférieure avec force. Cela fait combien de temps maintenant que tu es sur ta chaise, hein ? Tu n'en sais rien. Toi, tu te contentes juste de détailler le couloir. Tous les murs sont blancs. Le sol l'est aussi et les chemises sont tout aussi blanches qu'une feuille de papier pour dessiner. Tu soupires une nouvelle fois. Tu t'ennuies. T'as bien envie de bouger, de visiter les lieux, mais on te l'a interdit. Alors, tu ne bouges pas. Malgré ton envie de courir, malgré ton envie de t'amuser un peu et de t'inventer une vie pendant quelques minutes. Tu sursautes lorsque la porte à ta droite s'ouvre brusquement et que ton père sort avec un sourire jusqu'aux oreilles. Tu te redresses et sautes de la chaise en frémissant d'impatience. «
Alors ? Elle est là ? Je peux aller voir maman et Giusy ? » Tu lui demandes, les yeux illuminés. Ton père rit faiblement et te caresse les cheveux tendrement avant de te demander d'attendre encore un peu. Tu fais la moue et te rassois en grognant. Tu n'as pas envie d'attendre encore, mais tu le fais. Parce que ton père est ton héros et que tu ne désires pas le décevoir. Une vingtaine de minutes passent avant qu'une infirmière sorte de la chambre en souriant. «
Vous pouvez rentrer, mais pas très longtemps … Votre femme est très fatiguée, elle a besoin de repos. » Annonce-t-elle avant de partir. Ton père te prend dans ses bras et tu souris innocemment en te laissant faire avant de lâcher un «
ooooh », émerveillé. Ta mère est là et malgré la fatigue qui se lit sur son visage, tu vois qu'elle est pleinement heureuse. Ton père te pose à côté du lit doucement et tu caresses la joue de ta mère en souriant. «
T'es belle maman. » Tu ris faiblement avant de regarder le nouveau né qu'elle tient dans ses bras. «
Elle est belle aussi ! C'est ma Giusy ! J'aurais le droit de la prendre dans mes bras ? » Tu demandes, espérant que l'on te dise oui. «
Bien-sûr mon ange, mais attend un peu qu'elle grandisse, d'accord ? » Tu hoches de la tête en entendant la réponse de ta mère avant de t'étirer en baillant. Tu vas enfin pouvoir jouer au grand-frère pour de vrai. Tu l'attendais depuis tellement longtemps que tu ne veux plus quitter le bambin des yeux. Elle est si petite que tu as peur de la toucher, alors tu la regardes simplement, heureux.
Ton oncle explose de rire tandis que tu fais la moue, donnant un autre nom pour l'arme qu'il te montre en souriant, amusé. Il hoche de la tête et tu souris grandement. Tu as terminé le test. Simplement âgé de douze ans, tu sais déjà ce que tu veux faire. Depuis que tu es petit, tu veux devenir comme ton oncle. Flic. T'as dans l'espoir d'avoir la même renommé que lui. Jazz-King oncle et neveu contre tout, contre tous. Tu attrapes l'un des revolvers présents sur la table et le charge avant de te redresser, replaçant tes lunettes de protection sur le bout de ton nez. «
J'peux essayer de tirer, hein ? » Tu demandes innocemment, pressé de pouvoir tenter ton tout premier tir avec une arme à feu. Ton père soupire et se redresse, te relevant la tête pour qu'elle soit bien droite avant de te mettre devant la cible. «
Tu dois toucher le centre, d'accord ? Faut retirer la sécurité et fais attention de ne pas te blesser. Si tes parents apprennent ça, je suis mort. Et toi aussi, par la même occasion. » Te dit-il après avoir ébouriffé tes cheveux châtains. Tu souris un peu plus et hoche la tête avec vivacité avant de retirer le cran de sûreté en te concentrant. Tu inspires avant de tirer une première fois. Ton oncle explose de rire en voyant ta moue déçu tandis que tu réessayes et manques de peu de toucher la cible. «
C'est nuuuul ! » Dis-tu en boudant. «
Encore, Zéphyr. Vas-y. » T'ordonne-t-il tandis que tu l'écoutes, touchant la cible, sans pour autant que ce soit le milieu. Tu souris, satisfait. «
AHA ! Je l'ai touché ! » Tu reposes l'arme avec délicatesse avant de sourire, fier. «
On rentre ? J'ai trop faim ! » Ton oncle hoche de la tête avant de retirer son uniforme pendant que tu l'attends devant la voiture.
Tu soupires et évites le coup une nouvelle fois. Ta sœur crie en pleurant, mais tu ne dis rien. Ils t'ont cherchés en la draguant, c'est aussi simple que ça. Personne ne s'en prend à ta petite sœur. Tu grognes en sentant un poing s'abattre contre ta mâchoire. Tu titubes et te rattrape au mur, crachant du sang en plissant le nez. A trois contre un, ce serait peine perdue pour le premier abruti du coin, mais toi, t'es un Jazz-King. T'as fait de la boxe et ton oncle t'entraîne en cachette à te battre pour que tu deviennes flic, comme lui. Tu esquives le pied du gros lard de la bande et l'envoie par terre avec un simple crochet droit. Quel bande d'abrutis sérieux. Sept minutes passent jusqu'à-ce que tu arrives à mettre le troisième au sol, le souffle rauque. T'as pris de sacré coup, mais tu tiens encore debout. Tu soupires et passe une main dans tes cheveux pour les remettre en place. Bordel, ça fait un mal de chien, hein ? Tu lances un regard inquiet à ta sœur, t'approchant d'elle pour regarder son visage, plongeant ton regard dans le sien. «
T'as rien ? Dis-moi qu'ils t'ont rien fait ?! » Cris-tu tandis que ta petite sœur grimace. T'es simplement âgé de seize ans. Giusy en a douze. Comment est-ce que des mecs presque majeurs peuvent-ils être autant à la ramasse pour draguer une gamine même pas encore entrée dans l'adolescence ? Elle secoue la tête timidement en se mordant la lèvre inférieure. Tu sais très bien que tu lui fais peur lorsque tu t'énerves ainsi, mais ton côté impulsif prend toujours le dessus lorsqu'il s'agit de cette blondinette qui te sert de petite sœur. «
Giusy … Arrête de traîner dans les ruelles bizarres, sérieux. Il y aura un jour où j'arriverai pas à temps pour t'aider. » Tu soupires et lui prends la main. «
T'as intérêt à rien dire à p'pa et m'man sinon j'casse ta télévision, OK ? » Elle sourit faiblement et tes lèvres s'étirent en un rictus amusé. «
Seulement si tu me laisses désinfecter tout ça, d'accord ? Je sais que tu ne le feras pas sinon. » Tu exploses de rire et acceptes le marché, rentrant en boitant jusqu'à la maison.
Tu soupires et passes une main dans tes cheveux. T'en étais sûr. Tu l'savais déjà ; qu'ton père n'accepterait pas que tu deviennes policier. Ton oncle tente de calmer le jeu, mais ton paternel hurle, repousse son frère avec brutalité à chaque fois que celui s'approche un peu trop de lui. Ils vont finir par se taper dessus. Et tu sais que ton oncle en voudra à ton père. «
C'est bon. J'vais le faire, papa. » Dis-tu en soutenant son regard froid. Il hoche de la tête et demande à son frère de partir ; que la conversation est terminée. «
T'es sûr de toi, Zéphyr ? Pense à ta vie, pas à celle de mon frère. » Dit ton oncle. «
Choisis ce que tu veux, gamin. » Souffle-t-il avant de sortir de la villa en claquant la porte. Voilà. T'es foutu. Ton père te regarder en s'installant sur la table de la cuisine. Terminée la liberté. Terminées, les conneries. T'pourras même plus avoir des coups d'un soir sans avoir peur d'être pris en photo et critiqué dans les journaux le lendemain.